La connexion humain-nature comme voie vers la durabilité : une méta-analyse globale
Gladys Barragan-Jason1 (chercheuse) et la classe de 2nde2 du Lycée Talma (Brunoy) de Mme Lebrun2 et Mme Benazza2 (la liste des élèves est mentionnée en fin d’article)
Article original/Original article: Barragan-Jason, Gladys, Claire de Mazancourt, Camille Parmesan, Michael C. Singer, et Michel Loreau. « Human–Nature Connectedness as a Pathway to Sustainability: A Global Meta-Analysis ». Conservation Letters 15(1), 2021: e12852. https://doi.org/10.1111/conl.12852.
Institution: 1Theoretical and Experimental Ecology Station, French National Centre for Scientific Research, Moulis, France
2Lycée François Joseph Talma, 1, rue des cerfs, 91805 BRUNOY CEDEX
Résumé :
Une méta-analyse de près de 200 études basées sur la mesure de la connexion humain-nature (CHN) montre que cette dernière permet d’améliorer le bien-être et l’engagement des citoyens pour la préservation de la biodiversité. Différentes pratiques permettent de renforcer le CHN dont les plus efficaces sont la pratique de pleine conscience et le contact fréquent avec la nature.
Mots clés : Connexion Humain nature ; développement durable ; préservation biodiversité ; santé humaine
Les objectifs internationaux en matière de protection de la nature n’ont pas été atteints les scientifiques s’interrogent sur les meilleurs leviers pour mener à une mobilisation à la fois durable et efficace. Il s’agit de comprendre pourquoi les citoyens et les gouvernements ont encore du mal à considérer que la santé et le bien-être des humains dépendent de la santé du monde naturel ?
Une explication possible est d’ordre culturel. Les religions monothéistes et d’influents philosophes modernes comme par exemple Kant ont préconisé une discontinuité entre les humains et celui des autres êtres vivants. Ceci a conduit les gens à se considérer comme dominants et déconnectés du reste de la nature. C’est une vision moderne « occidentale » du monde. Une autre explication est l’urbanisation croissante de la population humaine mondiale. Aujourd’hui, plus de 55 % des humains vivent dans des zones urbaines, et cette proportion devrait atteindre 68 % d’ici 2050. Une conséquence majeure est l’augmentation de la déconnexion des personnes de l’expérience directe avec la nature. La combinaison d’une déconnexion psychologique et physique du monde naturel a pu entraîner une dévalorisation de la nature, légitimant et facilitant ainsi les pratiques destructrices envers la nature par les individus et les sociétés.
Que peut-on faire pour modifier ces tendances destructrices ?
L’IPBES affirme que les objectifs de durabilité ne seront atteints que si les êtres humains transforment leur relation à la nature et que la connexion à la nature devient la norme. Nous définissons la HNC comme la tendance avec laquelle les humains incluent le monde naturel en eux ou se considèrent comme faisant partie de la nature. Elle peut être mesurée selon cinq méthodes décrites dans la figure 1.
A travers une récente méta-analyse publiée dans Conservation Letters, des chercheurs de la Station d’Ecologie Théorique et expérimentale de Moulis (SETE – CNRS) ont montré que la connexion humain-nature (CHN) constitue un levier permettant de renforcer le bien-être et l’engagement des citoyens pour la préservation de la biodiversité.
Toutes les études sont fortement biaisées vers les adultes des pays industrialisés puisqu’elles ont été majoritairement réalisées dans ces pays et dans cette tranche d’âge.
Les résultats indiquent que 148 études corrélationnelles révèlent que les personnes avec une forte CHN sont plus heureuses et en meilleure santé, et sont également plus enclines à protéger la biodiversité et à lutter contre le changement climatique (Figure 1).
57 études expérimentales montrent que la CHN augmente après la participation à des interventions comportementales impliquant une exposition à la nature (ex : promenade en forêt) ou la pratique de la pleine conscience (focaliser son attention sur le moment/environnement présent). A l’inverse, aucun effet n’est observé après des interventions visant à améliorer les connaissances sur l’environnement ou sur la biodiversité (cours magistraux, interventions dans les classes ; Figure 3).
Cette analyse montre ainsi que la CHN a un double effet positif : celui de favoriser à la fois la conservation de la nature et le bien-être humain. Deux impacts qui pourraient être amplifiés via des interventions simples, impliquant un contact avec la nature et des pratiques de pleine conscience (Figure 1 et 3).
Ainsi, l’amélioration de la CHN via ces deux actions permettrait d’aider les individus à comprendre et à expérimenter à quel point le bien-être humain et la conservation de la nature sont interconnectés.
Renforcer la CHN constitue ainsi un levier pour atteindre un futur durable qui devrait être intégré dans les politiques de conservation.
Références :
Barragan-Jason, Gladys, Claire de Mazancourt, Camille Parmesan, Michael C. Singer, et Michel Loreau. « Human–Nature Connectedness as a Pathway to Sustainability: A Global Meta-Analysis ». Conservation Letters 15(1), 2021: e12852. https://doi.org/10.1111/conl.12852.
Ont participé au travail d’écriture de cet article, en collaboration avec Gladys Barragan-Jason, chercheuse en psychologie (par ordre alphabétique): ALI DILLEITA Malika, BABA SLIMANE Madina, BRETONNIERE Zilia, CARREIRA Chloé, COEUR-JOLY Lucas, COLETTA Camille, COLETTA Camille, CORMONT Léane, COTRAIT Camille, DE JESUS DOS SANTOS Gabriel, DEKKAR–YENGE Jamil, DOS SANTOS Pacôme, EL MKAREM Mohamed-Amine, HAMLIL Hadjar, HUSSAIN Ahmad, ISSODIE Natiss, KALONGONI Holiab, KHALLOUKI Léa, KLOUBERT Bastien, KOULIBALI Laura-Profina, LOPEZ Wendy, MABUSO EVA PINTO Britney, MARSOLLIER–BERTON Alexa, NOCARA Manoa, PACHAYAN Cléonice, PONSARD Titouan, REGO Alice, RITTLING Alexandre, ROSSI Mattéo, SACKO Aminata, SELLAMI Flavio, SERGI Clement, SPIEWEK JARDIN Alyssa, VILLEDIEU Théo
Comment citer cet article : Gladys Barragan-Jason et la 2nde2 du lycée Talma (Brunoy (FR)), La connexion humain-nature comme voie vers la durabilité : une méta-analyse globale, Journal DECODER, (2023-06-01)