Une glace au chocolat est meilleure en musique !
Sans vouloir faire de généralité, une glace au chocolat a plus de chance d’être élue meilleure dessert qu’une assiette de tripes. Et bien sachez qu’en écoutant de la musique dans un endroit adéquate, cette glace aura meilleur goût encore. C’est en tout cas la conclusion à laquelle sont parvenus le Dr Kantono et ses collègues de l’université d’Auckland en Nouvelle-Zélande (Kantono et al., 2018). Les résultats de cette étude alléchantes ont été publiés dans la revue Food research International sous le titre « The effect of music on gelato perception in different eating contexts » (« L’effet de la musique sur la perception du goût d’une glace dans différents contextes de restauration ») en 2018.
En effet, plusieurs études ont déjà démontré que la musique n’adoucit pas seulement les mœurs mais aussi notre perception des aliments comme le chocolat ou le vin. Par exemple, le jazz accentuerait la sensation de plaisir lorsque l’on goute un carré de chocolat. Cependant, le contexte dans lequel on mange un plat a également de l’importance : un même plat de spaghetti bolognaise par exemple sera mieux accueilli par notre palet dans un restaurant italien qu’ailleurs.
Les chercheurs se sont donc posé la question du rôle du lieu, en présence de différents types de musiques (neutre, une musique l’on aime ou que l’on n’aime pas), sur notre perception du gout d’une glace au chocolat. Bien que curieuse, cette étude permet de mettre en lumière le fait que notre perception du gout n’est pas indépendante du contexte dans lequel on le mange mais que nous sommes aussi influencés pat le contexte qui nous entoure.
Pour cela, un panel de 253 personnes a été recruté. Trois groupes ont été créés, associés chacun à un environnement bien particulier : un laboratoire dans lequel la musique été diffusée via un casque audio, un magasin de glace mais dans lequel un dôme était placé au-dessus de la tête des clients, un casque et un écran diffusé la musique et des images du magasin de glace et enfin dans un magasin de glace classique où la musique était diffusée par des enceintes. Le panel était constitué de personnes consommant régulièrement des glaces au chocolat, au moins une fois par mois. Bien entendu, aucun d’entre eux n’a fait état de troubles liés à la consommation de ce produit.
Plusieurs bandes musicales ont été proposées aux cobayes afin de les classer selon leur gout. Une échelle linéaire leur permettait de juger de leur attrait pour chaque bande son : aux extrêmes les bandes sons appréciées et celles non appréciées, au milieu les musiques qualifiées alors de neutre. Enfin, ils devaient également évoquer pour chaque musique leur ressenti relatif à leur amusement, bonheur, plaisir, colère, mépris, dégoût, amour, surprise et satisfaction. Ceci a permis de qualifier leur état d’esprit en fonction des chansons diffusées.
Enfin, l’expérience la plus intéressante était d’effectivement manger des glaces au chocolat. Pendant que les musiques étaient diffusées dans les trois types d’environnement, les « gouteurs » sélectionnaient le goût ressenti, s’il ressentait de la douceur, de l’âpreté, le crémeux, le gout de lait ou bien celui du chocolat. A chaque fois qu’un attribut est perçu, la personne les électionne sur un écran, et peut choisir le même plusieurs fois. Elle reçoit également des consignes sur les moments où elle doit déguster la glace et ne pas être trop gourmande.
Sans réelle surprise, déguster une glace au chocolat dans un magasin de glace, en ambiance, qu’avec un environnement virtuel (dôme) et encore plus qu’en laboratoire. De même, des musiques qui nous plaisent ont tendance à nous faire ressentir des émotions plus positives qu’avec des musique neutres ou qu’on n’apprécie pas (Figure 1). La douceur de la glace est plus souvent évoquée en présence d’une musique que l’on apprécie, dans le cas contraire, c’est plutôt le côté crémeux et l’amertume.
L’étude démontre que le contexte a une réelle influence sur notre perception de gout d’une glace au chocolat, et certainement pour d’autres aliments. Un environnement plaisant procure plus de plaisir mais la musique d’ambiance nous fait percevoir différentes facettes du produit. On comprend alors l’effort fait par les grandes enseignes pour nous inciter à acheter leurs produits et pourquoi on ne retrouve pas forcément la même sensation à notre retour dans notre cuisine. L’étude souligne aussi comme nos sensations, ici le goût, ne dépendent pas que du produit mais bien d’un ensemble de facteurs extérieurs qui induisent différentes perceptions, différents ressentis.
Alors si vous n’êtes pas un.e chef 3 étoiles encore et que votre plat pour vos invité.e.s de ce soir a brûlé, mettez un bon CD en fond sonore, ça peut vous sauver 😉 !
Référence : Kantono, K., Hamid, N., Shepherd, D., Lin, Y. H. T., Brard, C., Grazioli, G., & Thomas Carr, B. (2018). The effect of music on gelato perception in different eating contexts. Food Research International, 113, 43‑56. https://doi.org/10.1016/j.foodres.2018.06.030